La Morrigasme observe une montée d’intérêt pour le BDSM. L’artiste érotique bruxelloise livre cette semaine sa réflexion sur le sujet dans sa chronique.

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Saskia Vanderstichele
« Comment expliquer l’intérêt croissant de la société pour le BDSM* ? ». Voici la question qui m'a été posée. Pour tenter d'y répondre, je dois sortir des stripclubs et aborder mon expérience en tant que domina, et surtout en tant que pratiquante.
Je suis devenue domina parce que j'ai souhaité apporter aux autres les bienfaits de disciplines que je pratiquais depuis plusieurs années en tant que receveuse : le wax play (le fait de recevoir de la cire brûlante sur la peau), l'impact play (spécifiquement le fait de se faire fouetter, y compris le spanking : des impacts sur les fesses), le shibari (le fait de se faire encorder), le trampling (le fait de se faire marcher dessus), le breath play (le fait de se faire limiter la respiration), etc...
De par ces pratiques, on peut me ranger dans la catégorie « masochiste ». Attention, j'ai dit « masochiste », pas « soumise ».
Quand on prononce ce mot, on se heurte généralement à l’incompréhension. Les gens ne conçoivent pas l'idée de payer pour subir un mauvais moment. Moi non plus ! Parce que faire appel à un·e dom·ina, ce n'est pas ça. Le but est de se faire du bien.
Lors d'une session BDSM, c'est moi qui décide en tant que receveuse. La communication est constante et on veille à ce que la douleur n'aille pas au-delà d'un seuil que je n'accepterais pas. Mon but recherché est la détente.
C'est comme aller souffrir à la salle de sport. C'est une douleur « qui fait du bien ». Certes, c'est douloureux sur le moment mais on en ressort détendu et avec la sensation de planer grâce aux endorphines libérées.
Idem lorsqu'on réserve un massage chinois et que la personne qui masse vous enfonce ses coudes et ses pouces dans le corps. Un supplice d'un instant pour une grande détente.
Finalement, faire appel à un·e dom·ina, c’est la même logique : une douleur consentie, encadrée, pour un profond relâchement.
Une douleur consentie, encadrée, pour un profond relâchement.
Si vous avez déjà pratiqué la course à pied, vous vivez exactement ce que je vis lors d'une séance de flagellation. Tout simplement.
Quant à la popularité grandissante de ces pratiques, je l'explique de plusieurs façons :
- Premièrement, la levée du tabou : le fait d'en parler plus librement dans les médias (rappelons que « 50 shades of Grey » n'est PAS une représentation de ce qu'est le BDSM, au même titre que « Fast & Furious » n'est PAS un documentaire sur le code de la route).
- Deuxièmement : le stress de notre société actuelle. Il n'est pas étonnant que nous soyons nombreux.euses à ressentir le besoin de tout lâcher, de nous abandonner entre les mains de quelqu'un de confiance et de juste recevoir. Pour moi, me réserver une session BDSM est comme me réserver un massage pour d'autres personnes. Souvent, un massage ne sera pas suffisant pour dégager le stress et les tensions du quotidien et les coups de fouet seront beaucoup plus efficaces.
Quand nous subissons des pressions extrêmes, il faut y répondre par des solutions radicales.
Quant au qualificatif « soumise », je ne me reconnais pas dedans. Si je m'abandonne quand, comment et avec qui je le veux, suis-je vraiment « soumise » ?
*BDSM = Bondage et Discipline, Domination et Soumission, Sado-Masochisme : ensemble de pratiques sexuelles et contractuelles utilisant la douleur, la contrainte, l'humiliation érotique ou la mise en scène de divers fantasmes sexuels.
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